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Il y a un an jour pour jour


Je vous emmène avec moi faire un saut dans le temps. Parce que ça me fera du bien de vous en parler et aussi parce que ça peut arriver à n’importe qui. La mort ne se gêne pas, elle peut frapper n’importe qui de façon soudaine.

24 avril 2016

Nous sommes la veille de mon départ en Chine. J’avais invité mon chum et ma maman à venir célébrer mon départ. Mon papa et moi partions le lendemain pour notre troisième voyage ensemble.

Je me souviens, nous avions comme plan d’aller acheter les ingrédients nécessaire pour faire la recette spéciale de burger à mon chum. Puisque je partais du 25 avril au 31 mai et que la fête de ma maman est le 2 juin, je voulais lui planifier un petit anniversaire surprise pour célébrer ses 60 ans. 60 années de vie tout de même ça se fête. Je comptais lui acheter un gâteau avec des Schtroumpfs puisqu’elle adore ses petits personnages bleus. Je me suis d’ailleurs renseigné sur le prix de ce genre de gâteau au Provigo. En me retournant, je vois des fleurs. Je choisis un joli bouquet jaune. Ma maman va adorer.

En arrivant à la maison, maman voulait retourner chez elle (mes parents ne vivent plus ensemble, mais ont tout de même une très bonne relation). Elle n’avait pas très faim et je la connais suffisamment bien pour savoir qu’elle n’aime pas les au revoir. J’accepte donc qu’elle retourne chez elle malgré notre soirée de festivités.

Mon papa, mon chum et moi lui faisons un gros câlin. Pour ma part, je lui en fais plusieurs. D’ailleurs, je lui remet les fleurs. Elle pleure, ému du geste. Je lui dis donc « bye maman, je t’aime. »

25 avril 2016

La journée passe très vite. J’écoute le dernier Hunger Games avec mon chum. J’adore! Je termine mes bagages. En un rien de temps je me retrouve à l’aéroport à attendre mon avion pour Vancouver. Je reçois un téléphone. C’est maman. Elle est très triste que je parte comme à chacun de mes voyages, mais elle sait que voyager est ma passion. Je lui dis donc où j’en suis et ce qui m’attend dans les prochaines heures. On raccroche. On se quitte encore une fois sur un « bye Maman, je t’aime. »

Vol de cinq heures pour Vancouver. Une fois là-bas, nous devons attendre 12 heures. On décide de se louer une chambre pour aller dormir. Je décide d’appeler ma mère puisque le décalage n’est pas trop pénible et qu’il est encore tôt là-bas. Ça sonne trois coups, pas de réponse. Je rappellerai. C’est une couche-tôt, elle doit dormir.

26 avril 2016

Je rappelle le lendemain. Toujours pas de réponse. Ah bon. On skypera en Chine alors.

C’est officiellement le grand départ. 13 heures de vol entre Vancouver et Beijing. On arrive dans la capitale chinoise, c’est la nuit. D’ailleurs, nous sommes assez fatigués. On décide donc d’aller dormir.

Au réveil, avec le décalage horaire, nous sommes toujours le 26 avril. Avant de partir j’avais prévenu mes amies que les réseaux sociaux ne fonctionnaient pas en Chine. J’avais tout de même précisé qu’un de mes amis qui étudie là-bas m’a peut-être trouvé une solution. Un VPN. Effectivement, ça fonctionne. Je me connecte donc sur Facebook, puis sur Messenger. Je vais dans ma conversation avec mes quatre amies du secondaire. Une cinquantaine de messages non-lus. Je dois me remettre à jour.

-J’espère vraiment me tromper les filles, mais je pense que la mère de Miie est morte. (Miie... c’est moi.)

Ma tête se met à tourner et à rassembler tous les éléments dans ma tête. Elle n’a pas répondu quand je l’ai appelée de Vancouver et pourtant elle attend toujours mes appels avec impatience.

Elle n’allait pas très bien la veille, ce n’était pas la première fois alors ça ne sert à rien de s’inquiéter non?

Tout à coup un message apparaît sur mon ipad. Mon cousin.

Lui: Tu as fait bon voyage?

Moi: Qu’est-ce qui se passe à la maison?

Lui: Attend, je vais dire à mon père que tu es en ligne.

Un appel skype entre.

J’ai devant moi mes deux oncles et ma mamie. Ce qui est franchement un beaucoup trop gros comité d’accueil pour seulement célébrer mon arrivée en Chine.

Mon oncle: Salut! Et puis tu as fais bon voyage?

Moi: Je m’en fou, je veux savoir tout de suite ce qu’il se passe?

Mon oncle: Mamie est allée chez ta mère tantôt pour lui porter quelque chose. Elle était étendue sur son divan. Elle avait l’air paisible. Elle s’est envolée comme un bel oiseau.

C’est la première fois que j’écris cette histoire. Ma vision. Comment moi je l’ai vécue. C’est replonger si intensément dans mes souvenirs. Mes oncles et ma mamie ont raccrochés en me disant qu’ils prenaient la situation en main. Que je devais rester en Chine, que ça me ferait du bien.

Mon père et moi avons passé les trois heures suivantes dans un McDo. Oui oui, dans un McDo. Nous devions déjeuner et c’était le seul restaurant près de notre hôtel qui servait quelque chose le matin. J’ai parlé à mon père durant ces trois heures. Pour tenter de comprendre ce qu’il se passait dans ma tête. Principalement, ces trois heures étaient composées de larmes.

Mon père m’a ensuite proposé de prendre un taxi pour aller visiter l’un des sites les plus visités, la place Tian’amen. Je n’étais pas certaine de vouloir y aller, mais mon père savait que je ne pouvais rester à me morfondre dans la chambre d’hôtel. Nous y sommes donc allés. C’était une journée spéciale. J’ai fait une activité extraordinaire, tout en sachant que j’avais perdu ma mère. J’ai tout fait normalement, sauf que je pleurais plus. Je mettais mes lunettes de soleil pour éviter que les Chinois croient que les Canadiennes pleurent toutes une fois à l’extérieur de leur pays.

Plusieurs monuments se trouvent sur la place Tian’anmen dont le monument dédié à Mao Tsedong. Nous sommes allés nous asseoir dans le parc de cet endroit sur le bord d’un cours d’eau vert. Je réfléchissais avec papa. Je devais déménager les choses de Maman, je vais devoir faire ci et encore ça. J’avais plusieurs détails techniques dans la tête.

De retour à l’hôtel, mon copain qui étudie en Chine m’avait écrit, il voulait me voir. Je lui ai répondu:

« Je serais vraiment ravie de te voir aujourd’hui, mais je t’avertie que je ne suis pas la meilleure compagnie en ce moment. Je viens d’apprendre que ma maman est morte. »

Il voulait me voir quand même. Peut-être même davantage étant donné la situation. Quand il est arrivé, ça m’a fait comme une bouffé d’air. Une deuxième personne connue que je pouvais serrer dans mes bras.

Ces cinq semaines passées en Chine ont été les plus extraordinaires de ma vie et les plus bouleversantes. Je crois que sans ce pays, la nouvelle aurait été encore plus percutante. De plus, j’ai toujours trouvé cela hyper étrange qu’on se soit quitté sur des adieux. Personne ne pouvait se douter qu’elle succomberait d’une crise de coeur le lendemain, mais c’est ce qui est arrivé. Et vous vous souvenez de l’impulsivité d’acheter des fleurs avant mon départ? D’où ça m’était venu? Aucune idée. Tout ce que je sais c’est que cette journée-là, ma maman et moi nous sommes quittées sur une bonne note. Et c’est cette note qui a marquée la fin.


Mon témoignage d’aujourd’hui est donc en l’honneur de Johanne Lavallée.

Décédée le 26 avril 2016.

Reposes-en paix maman. Je t’aime tellement.

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